Lors du Lomé Peace and Security Forum, l’économiste et homme politique togolais Kako Nubukpo a rappelé l’importance du lien étroit entre développement économique, paix et sécurité. Selon lui, ces trois piliers sont indissociables : « sans développement, il ne peut y avoir de paix durable, et sans paix, le développement est impossible ».
L’ancien ministre togolais a insisté sur le rôle central de la souveraineté nationale dans la stabilité et la prospérité du continent. Pour lui, la souveraineté monétaire constitue un levier essentiel de cette indépendance. « Le pouvoir de battre monnaie est une fonction souveraine », a-t-il déclaré, avant de préciser : « Dès qu’il y a société, il y a monnaie, et la souveraineté s’exerce à travers la monnaie. Et donc même si on gère mal notre monnaie, on aurait quand même le droit d’avoir notre monnaie. »
Créé le 26 décembre 1945, le franc CFA demeure, selon Kako Nubukpo, une monnaie héritée du système colonial. Il estime qu’une réforme en profondeur s’impose : « Plus de 80 ans après la création du franc, il me semble surprenant que nous gardions encore le nom de cette monnaie, puisque initialement le franc CFA signifiait “franc des colonies françaises d’Afrique”. Même si, au moment des indépendances, on a parlé de “communauté financière africaine”, il est clair que, même symboliquement, il est grand temps de changer le nom de cette monnaie et d’ouvrir un débat macroéconomique sur sa capacité à financer la transformation structurelle de nos économies. »
Ce que reproche Kako Nubukpo au CFA
L’économiste souligne que le franc CFA favorise une économie extravertie, davantage tournée vers l’importation que vers la production locale. « Quand vous avez le franc CFA, en termes d’incitation, vous êtes plus portés à importer des biens et services de l’étranger plutôt qu’à les produire vous-mêmes. »
Prenant l’exemple des pays anglophones comme le Ghana, le Nigéria ou la Gambie, Nubukpo a montré que leurs monnaies nationales, bien qu’inflationnistes, contribuent à financer l’économie réelle. Il a notamment cité le Ghana, dont le taux directeur atteint 24 %, mais dont la politique monétaire soutient l’investissement et la production intérieure.
Pour Kako Nubukpo, l’Afrique doit repenser son système monétaire afin qu’il serve la transformation structurelle : développement industriel, valorisation des matières premières et création d’emplois.
« La monnaie doit permettre la montée en gamme dans les chaînes de valeur, favoriser l’industrialisation et garantir la prospérité. »
En conclusion, le macroéconomiste estime que la réforme monétaire et la fin du franc CFA constituent une urgence stratégique pour assurer la souveraineté et l’épanouissement économique de la région ouest-africaine.
Par Aminata KABORE



