Le 1er tour de l’élection présidentielle togolaise est prévu pour le 22 février prochain. Plusieurs candidats se bousculent aux portillons du côté de l’opposition. Parmi eux, Gerry Taama. Le Président du Nouvel engagement togolais (NET) croit toujours en la possibilité de réaliser l’alternance politique à la tête du Togo à l’issue du scrutin. Pour y arriver, il décrit une stratégie concertée, basée sur le travail individuel de chaque candidat, de sorte à en faire un grand fleuve au second tour de l’élection. Dans un entretien accordé à Togobreakingnews, l’ancien officier des Forces armées togolaises (FAT) revient également sur les derniers évènements de sa vie privée qui ont alimenté des polémiques sur les réseaux sociaux. Gerry Taama clarifie et ne jure désormais que par le futur. Au sujet de la Présidentielle, il pense être le faiseur de rois, s’il ne le devient pas lui-même.
Togobreakingnews.info: Avant d’entrer dans le vif du sujet de cette interview, nous aimerions vous présenter nos condoléances pour les malheurs qui vous ont frappé ces derniers temps. Puisse Dieu accueillir l’âme des défunts dans son royaume.
Gerry Taama : Je vous remercie.
Comment se porte Monsieur Gerry Taama ?
Gerry TAAMA va bien. Comme vous l’avez si bien dit, j’ai perdu des proches dans des délais très courts. Ce sont des moments assez difficiles, mais le sens de la responsabilité exige qu’on transcende ses émotions et qu’on se montre fort. Donc, oui, je vis avec le chagrin des êtres perdus, mais au bout d’un moment, il faut lever la tête et avancer. Ceux qui sont partis n’auraient d’ailleurs jamais accepté qu’on arrête de vivre pour eux. La mort nous encourage à mieux faire, car la vie est courte.
Dès le début, votre nom a été à plusieurs reprises associé au décès de la présentatrice de TV2, Raima Akondo. Depuis, vous êtes restés bien silencieux. Qu’avez-vous à dire à ce sujet ?
L’attitude normale qu’un être humain adopte quand il perd un être cher est le recueillement. Raima était une femme extraordinaire, talentueuse et généreuse. J’ai partagé une partie de ma vie avec elle et je crois avoir été privilégié. Quant au reste, je crois que la réaction de famille a été claire. En déplacement professionnel, elle a eu une crise à laquelle elle n’a pas survécu.
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Les médecins ont fait tout leur possible. C’est tout. Tout le reste ne procède que de la méchanceté gratuite à l’encontre de l’homme politique que je suis. Mais à la veille des élections majeures, c’est plutôt normal. Je regrette simplement que certains journalistes n’aient pas pensé à honorer la mémoire de leur collègue. Mais c’est du passé. Comme je l’ai dit, Raima était une femme extraordinaire et pleine de bonté. C’est le souvenir que j’en garderai.
Il y a quelques jours, le gouvernement a fixé la date du premier tour de l’élection présidentielle, ainsi que les dates de la campagne présidentielle. En tant que premier candidat déclaré pour ces élections, comment analysez-vous de cette annonce.
Nous savions que les élections auront lieu entre février et mars 2020, et qu’il y aura une campagne électorale. Donc je n’ai aucune observation particulière. Nous avons pris acte et nous travaillons en conséquence.
Le préfinancement de la campagne électorale cette année est de 500 millions, dont 60% qui seront décaissés avant la campagne. En comptant qu’il y aura plus d’une dizaine de candidats, la part qui reviendra à chaque candidat sera plutôt marginale. D’aucuns l’estiment à 3 millions par candidats. Dans ces conditions, maintenez-vous toujours votre candidature ?
Je serai hypocrite si je disais que le préfinancement du gouvernement est inutile. Dans un contexte politique où les partis de l’opposition ont des ressources limitées, cette aide est appréciable. Mais vous pensez bien que le parti au pouvoir ne donnera pas à ses opposants les moyens pour se faire battre. J’ai été candidat aux élections présidentielles de 2015, à l’époque, chaque candidat avait obtenu 72 millions, et sur le terrain, face au parti au pouvoir, cette somme était dérisoire. Même avec un milliard de francs par candidat, on partira toujours avec des longueurs de retard sur le pouvoir. Nous comptons plus sur la maturité du peuple togolais pour faire la différence. Les Togolais commencent à comprendre que les prodigalités de campagne sont évanescentes. Nous comptons plus sur notre programme de société, notre approche politique que sur les moyens financiers. Sur ce point, Unir est imbattable.
Vous reconnaissez qu’Unir à plus de moyens que vous. Dans ce cas, sur quoi comptez-vous pour gagner en 2020 ?
Sur la dispersion des voix induite par les élections à deux tours. Il y a deux scénarios possibles. Le premier, c’est que avec nos 15% qui est notre objectif raisonnable, nous soyons le premier parti de l’opposition , suivi de tous les autres qui font un score suffisamment groupé pour que le parti au pouvoir se retrouve avec moins de 50% et dans ce cas, nous irons à un second tour où nous comptons sur les autres partis de l’opposition pour nous soutenir, c’est le scénario de la Guinée. Second scénario ; un autre parti de l’opposition passe devant avec suffisamment de suffrages pour se qualifier pour le second tour et nous le soutiendrons. Mais pour que l’un de ces scénarios soit plausible, il faut qu’on travaille suffisamment sur le terrain. Les stigmates de nos errements de 2017, de 2018 et de la déroute des élections locales de 2019 seront difficiles à effacer.
En quelques mots, Monsieur Taama, croyez-vous toujours en l’alternance politique au Togo en 2020 ?
Ça sera difficile parce que pour le moment, l’opposition politique togolaise est plutôt apathique et plongée dans une sorte de léthargie. Moi, en tant que candidat, j’ai suspendu mes activités politiques suite aux deuils qui m’ont frappé. Je le reprendrai après les inhumations, d’ici une semaine. Mais quand vous regardez l’actualité politique, vous constatez que peu de choses bougent sur le terrain. Ca craint. En novembre, il y a eu à peine trois partis politiques de l’opposition à sillonner le pays.
Votre parti le NET est souvent taxé de béquille de UNIR. Que répondez-vous à vos contempteurs ?
(Rires). Vous savez, tous les partis politiques de l’opposition ont au moins une fois été taxés de béquille du pouvoir. Une béquille, c’est un petit instrument qui permet à un engin à deux roues de ne pas tomber quand il est à l’arrêt. Donc nous serions très importants. Bref, pour redevenir sérieux, quand vous voyez les passe-d’armes que nous avons à l’assemblée nationale, les tracasseries administratives et parfois la virulence des propos de certains militants du parti au pouvoir nous concernant, vous pouvez aisément comprendre que c’est parce que nous ne sommes pas excessifs dans notre démarche politique qu’on nous colle cette étiquette. Mais nos militants et sympathisants savent faire la différence. C’est pourquoi nous avons fait une telle percée lors des élections municipales.
Pensez-vous que l’élection présidentielle de 2020 remplit toutes les conditions de transparence et d’équité.
Dans un pays avec près de 50% de taux de pauvreté, il est difficile de faire une élection équitable si vous n’avez pas d’argent. Dans un pays où les mentalités ne se sont pas encore affranchies de l’asservissement à la fonction publique, il est difficile de gagner face à la puissance de l’administration qui est encore majoritairement affiliée au pouvoir. Dans un pays où les partis de l’opposition ont du mal à disposer d’agents électoraux fiables, où régulièrement, l’opposition a du mal à anticiper sur la formation de ses militants partout dans les hameaux, il est difficile de parler de transparence. J’ai pris part à plusieurs élections au Togo. La tentation de la fraude est dans tous les camps, et ceux qui peuvent voler sans se faire prendre le font allègrement. C’est le jeu politique, on ne se fait pas de cadeaux. Autrement, nous avons un bon code électoral, c’est sa mise en application qui est difficile.
Nous arrivons au terme de cet entretien. Qu’avez-vous à dire au peuple togolais ?
Comme je l’ai précisé dans mon propos, une prise en compte des réalités politiques est en train de se dessiner au Togo. Les Togolais ne sont plus disposés à se laisser tromper par des artifices de campagne. Ils veulent du concret. Ils veulent de la cohérence. Près de 60% de la population Togolaise a moins de 35 ans. Cette génération veut connaitre une autre gouvernance, un nouveau président. Je crois humblement que je représente cette génération. Je suis jeune, et ma vie épouse la trajectoire de la majorité des jeunes Togolais aujourd’hui. J’ai fait des petits boulots en étant jeune pour survivre, docker, agent d’entretien, Zemidjan, officier formé à Saint-cyr puis chef d’entreprise. Cette génération a besoin d’un représentant. Et je suis ce représentant-là. Ensemble, construisons notre futur.
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