Les premières réunions des conseils municipaux issus des récentes élections locales se sont achevées le 17 octobre 2025. À l’issue de ce processus, 117 maires ont été élus à travers le pays dont trois ministres-maires. Ces derniers cumulent désormais leur portefeuille ministériel avec une casquette municipale. Joseph Koamy Gomado, Abdul-Fahd Fofana et Antoine Lekpa Gbegbeni incarnent désormais une stratégie de ‘local power’ de Faure Gnassingbé.
Antoine Lekpa Gbegbeni pour contrôler Guérin-Kouka et environs
Ministre de l’Agriculture, de la Pêche, des Ressources animales et de la Souveraineté alimentaire, Antoine Lekpa Gbegbeni a été élu maire de la commune de Dankpen 1, dans la région de la Kara, le 16 octobre dernier. Fidèle du parti présidentiel Union pour la République (UNIR), ce cadre du Nord au parcours ascendant illustre la continuité du maillage politique du pouvoir central dans les territoires.
Économiste de formation, Antoine Gbegbeni débute sa carrière politique en 2007 comme député de la préfecture de Bassar. À l’Assemblée nationale, il siège notamment à la commission des finances, avant d’être appelé à diriger la Société togolaise des eaux (TdE) de 2014 à 2018. Sa nomination au gouvernement en février 2018, d’abord à la tête du ministère de l’Eau et de l’Assainissement, marque un tournant. Depuis octobre 2020, il pilote la politique agricole nationale, devenue stratégique dans un contexte d’autosuffisance alimentaire et de souveraineté nationale.
Sa prise de fonction comme maire de Dankpen 1 s’inscrit dans cette logique d’efficacité de terrain. Proche des réalités rurales, il entend renforcer les infrastructures de base et la résilience des producteurs agricoles de sa commune. Pour beaucoup d’observateurs, sa double casquette de ministre et de maire pourrait faciliter la coordination entre politique nationale et développement local.
Joseph Koamy Gomado, un OVNI politique de la 5e République
À Lomé, Joseph Koamy Gbloèkpo Gomado, figure atypique du paysage politique togolais, conserve son fauteuil de maire de la commune du Golfe 1. Réélu le 17 octobre, ce ministre de Faure Gnassingbé cumule désormais cette fonction avec son département de développement local au sein du gouvernement.
Ancien membre influent de l’Alliance nationale pour le Changement (ANC), il avait rompu avec la ligne d’opposition radicale pour rallier le pouvoir en août 2024. Une décision qui lui valut son exclusion du parti. Fondateur du mouvement TOVIA (Togolais Viens Agir), Joseph Gomado est connu pour sa vision pragmatique du développement urbain, fondée sur la participation citoyenne, la planification écologique et la revalorisation des quartiers précaires.
À la tête du Golfe 1, commune stratégique de la capitale, il s’est illustré par des initiatives en faveur de la propreté urbaine, de l’assainissement et de la gestion durable des déchets. Son profil de technicien et de planificateur du développement, doublé d’une expérience en gouvernance locale, fait de lui l’un des maires les plus appréciés du pays. Même si au sein de l’opinion, il traîne une étiquette de collaborationniste.
Abdul-Fahd Fofana, le visage de la jeunesse en action
À Agoè-Nyivé 4, l’élection d’Abdul-Fahd Fofana à la tête de la mairie vient consacrer un parcours météorique. Ministre délégué chargé de la Jeunesse et des Sports, ce docteur en économie internationale est aussi un entrepreneur social engagé. Avant d’intégrer le gouvernement, il a travaillé au Tony Blair Institute for Global Change et au Centre de développement de l’OCDE, où il a acquis une solide expertise en politiques publiques et en développement inclusif.
Fondateur de Youth for Youth (Y4Y), un réseau dédié à la formation et à l’autonomisation des jeunes africains, Fofana a accompagné des centaines de jeunes entrepreneurs et cadres à travers le Togo. Son profil cosmopolite et son dynamisme font de lui l’un des symboles d’une nouvelle génération de dirigeants togolais, formés à l’international mais qui doit désormais composer avec la réalité locale.
À la tête de la commune d’Agoè-Nyivé 4, le jeune ministre-maire aura pour défis de moderniser les infrastructures de base dans une commune confrontée à une inondation criarde et où les jeunes s’attendent à un véritable coup de pousse pour se lancer. Sa double fonction devrait lui permettre de mieux articuler les politiques publiques nationales de jeunesse avec les besoins spécifiques de sa collectivité.
3 ministres-maires pour le « local power » à la togolaise
Avec ces trois ministres-maires, le président Faure Gnassingbé consolide un modèle de gouvernance où les cadres de l’État investissent aussi le terrain communal. L’objectif est renforcer la présence institutionnelle du pouvoir dans les territoires. En effet, l’élection de ces 3 ministres à la tête des maires répond à des enjeux politiques locaux.
Plutôt qu’un renforcement de la décentralisation, plusieurs observateurs voient dans cette stratégie un moyen pour le pouvoir central de mieux contrôler ces territoires. Dans les faits, ces choix illustrent surtout une stratégie d’enracinement politique — un maillage territorial qui permet au régime de Lomé de consolider ses relais d’influence à tous les niveaux de l’administration, de l’État jusqu’aux communes.
Antoine Lekpa Gbegbeni, Joseph Koamy Gomado et Abdul-Fahd Fofana illustrent désormais une même dynamique visant une continuité politique, une expertise technique et un enracinement local. Vivement qu’ils apportent des réponses concrètes aux préoccupations des citoyens de ces communes.
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