Le Général Damehame Yark a été nommé le 13 octobre 2025 ministre, Directeur de Cabinet de la Présidence du Conseil. Une fonction, placée au cœur de l’orchestre du pouvoir, qui témoigne de la confiance renouvelée que le président du Conseil, Faure Gnassingbé, lui accorde. Pour mieux comprendre la portée de ce choix, il convient de revisiter la trajectoire, parfois discrète mais toujours stratégique, de l’un des hommes forts du dispositif sécuritaire togolais.
Au cœur du pouvoir de Faure Gnassingbé
Né en 1963 à Dapaong (région des Savanes), Damehame Yark a mené une carrière à l’intersection des sphères militaires, de sécurité intérieure et de gouvernance. Formé au sein des structures de défense togolaises, il gravit les échelons jusqu’au grade de général de brigade en avril 2018, ce qui lui confère une stature notable dans les cercles militaires nationaux.
Mais sa présence dans les arcanes du pouvoir commence à se cristalliser lorsqu’il est nommé ministre de la Sécurité et de la Protection civile en juillet 2012, sous les gouvernements Ahoomey-Zunu (I et II), alors qu’il était encore Directeur général de la Gendarmerie nationale. En tant que ministre de la sécurité, il porte notamment l’initiative controversée du port obligatoire du casque pour passagers et conducteurs de moto, une mesure de sécurité routière visant à lutter contre les nombreux accidents dans le pays.
En septembre 2023, il est investi d’un nouveau mandat. Il devient ministre d’État, ministre de l’Eau et de l’Hydraulique villageoise. Puis, en août 2024, dans le gouvernement de transition de Victoire Tomégah Dogbé, il change encore de portefeuille en prenant les ressources halieutiques, animales et la réglementation de la transhumance.
Aux yeux de beaucoup, ces mouvements fréquents témoignent de sa capacité à occuper des postes de responsabilité — quitte à être repositionné au gré des arbitrages politiques — et d’un profil polyvalent, apprécié pour sa discrétion et sa fidélité.
Damehame Yark, un homme de l’ombre et des équilibres
La nomination de Damehame Yark au poste de directeur de cabinet du Président du Conseil le place dans une position d’influence accrue. Cette proximité avec l’organe exécutif indique qu’il deviendra un pivot de l’animation politique, de la coordination sécuritaire et de la stratégie du gouvernement.
Mais derrière cette montée se lit un profil tracé par les compromis entre discipline militaire, culture du contrôle et stratégie politique. Damehame Yark n’est pas perçu comme une figure de mobilisation populaire ; sa force réside dans sa capacité à naviguer au sein des arcanes de l’appareil étatique.
Sa longévité dans les ministères sensibles de la Sécurité, de l’Eau ou des ressources halieutiques témoigne d’une confiance constante de la présidence. Il a acquis une réputation d’opérateur dosé, capable de mener des tâches techniques exigeantes sans trop s’exposer.
Il est intéressant de noter également une coopération internationale visible : lors d’une visite du commandement de l’USAFRICOM en 2023, le général Yark a été reçu dans le cadre de discussions sur la sécurité maritime et la coopération régionale.
Défis et enjeux de sa nouvelle fonction
Passer du ministère, même d’importance, à la direction de cabinet du Président du Conseil change la nature de l’influence exercée. Il devra désormais jouer les équilibristes entre les forces politiques, les ambitions personnelles et les tensions sécuritaires internes.
Son défi sera double. D’abord politique parce qu’il devra assoir sa légitimité dans un rôle moins visible, mais potentiellement influent, dans la coordination gouvernementale et la gestion des crises. Ensuite, stratégique parce qu’il lui reviendra de mettre à profit son expérience sécuritaire pour accompagner la gouvernance de la Ve République dans un contexte national et régional instable — au Togo comme dans la zone sahélienne — sans devenir une figure militarisée du pouvoir civil.
Enfin, cette nomination réaffirme la logique — fréquente dans les États africains — de faire coexister l’autorité civile et le poids sécuritaire, en confiant des postes-clés à d’anciens militaires devenus acteurs politiques.
Le Général Damehame Yark incarne un équilibre subtil entre pouvoir, loyauté et technicité. Son ascension vers la direction de cabinet du Président du Conseil en fait aujourd’hui une pièce maîtresse de l’architecture du pouvoir togolais sous la Ve République. Pour lui, l’enjeu sera de convertir sa trajectoire sécuritaire en un capital politique utile à la gouvernance, sans rompre avec le profil d’ombre qu’il s’est forgé depuis des années.
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