À Washington, l’ambassade du Ghana a été secouée par un vaste scandale de corruption, mis au jour par une enquête interne du ministère des Affaires étrangères. L’affaire, jugée d’une « gravité extrême », a conduit le Ghana à fermer temporairement la représentation, à rappeler l’ensemble du personnel diplomatique et à initier une série de sanctions disciplinaires lourdes.
À l’origine de cette décision, un réseau de fraude qui aurait opéré pendant au moins cinq ans, selon les conclusions du rapport préliminaire présenté ce lundi par le ministre des Affaires étrangères, Samuel Okudzeto Ablakwa.
« Ce que nous avons découvert dépasse tout entendement. Il s’agit d’un système organisé, structuré et entretenu par des agents censés représenter l’État ghanéen à l’étranger », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse à Accra.
Un agent local au cœur du système
L’enquête cible principalement Fred Kwarteng, informaticien recruté localement en août 2017, présenté comme l’architecte de la fraude. Ce dernier aurait installé, sans autorisation, un lien détourné sur le site officiel de l’ambassade, redirigeant les demandeurs de visa et de passeport vers Ghana Travel Consultants (GTC), une entreprise personnelle qu’il contrôlait.
« Des frais additionnels non réglementés, allant de 29,75 à 60 dollars américains, étaient facturés aux usagers. Ces montants n’étaient ni reversés au Trésor public ni soumis à un quelconque contrôle administratif », a précisé le ministre. Pis encore, les recettes auraient été versées directement sur le compte privé de Kwarteng, en violation flagrante de la législation sur les frais publics.
Le ministre n’a pas tardé à réagir. Fred Kwarteng a été immédiatement licencié, le personnel diplomatique affecté à Washington rappelé à Accra, tandis que l’ensemble des employés recrutés localement a été suspendu dans l’attente de procédures administratives. Le service informatique de la mission a été dissous, et un audit médico-légal a été confié au Vérificateur général pour estimer les pertes financières et identifier d’éventuelles complicités au sein du ministère.
L’ambassade de Washington elle-même a été mise en sommeil à compter du 26 mai. Une mesure qualifiée de « nécessaire » par le ministre Ablakwa, qui invoque la nécessité de restructurer les systèmes de gestion et d’assurer « un redémarrage sous contrôle ».
Le Ghana active la tolérance zéro
Pour le gouvernement du président John Dramani Mahama, cette affaire tombe à un moment charnière, alors que le chef de l’État s’est engagé dans une campagne musclée contre la corruption et l’impunité dans la haute administration.
« Ce scandale démontre que la vigilance doit être constante, y compris dans nos missions diplomatiques. La tolérance zéro que nous prônons n’est pas un slogan, mais une ligne de conduite », a martelé Ablakwa.
En attendant la réouverture de l’ambassade, les services consulaires du Ghana aux États-Unis seront redirigés vers les représentations à New York et Houston. Une cellule de crise a été mise en place pour traiter les urgences, tandis qu’une réforme du système de délivrance de documents consulaires est annoncée pour les semaines à venir.
Avec ce scandale, le Ghana renoue avec une vieille réalité : même à des milliers de kilomètres du pays, la corruption reste un mal qui exige une vigilance sans relâche. Le chantier de moralisation de la diplomatie ne fait que commencer.
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