Cette année marque le cinquantième anniversaire de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Les festivités pour ce cinquantième anniversaire ont débuté le mardi 22 avril 2025 à Accra, au Ghana. Tandis que la Communauté fête son anniversaire, les experts persistent à se concentrer sur sa position et les défis qu’elle peine à surmonter.
Au cours des dernières années, l’institution a dû affronter divers défis, étant critiquée et mise à mal. Elle se trouve maintenant à un tournant décisif. Cependant, de nombreux de spécialistes examinent les rendements du bloc économique ainsi que les origines de la grave crise qui a récemment éclaté au sein de l’entité.
Léandre Sahiri, Enseignant-chercheur, psychocritique, écrivain et éditeur, a également partagé son point de vue sur les acquis de la CEDEAO.
Selon l’expert, la CEDEAO n’a pas atteint ses objectifs initiaux, car elle est devenue un lieu pour des dirigeants déconnectés de la réalité de leurs concitoyens: « Depuis sa création en 1975, la CEDEAO prétend œuvrer pour l’intégration économique et politique de l’Afrique de l’Ouest. Pourtant, les peuples n’ont pratiquement jamais été associés aux processus décisionnels. Cette institution fonctionne comme un club fermé de chefs d’État, éloigné des préoccupations populaires : chômage, insécurité, inflation, pauvreté endémique. »
Dans son analyse, Léandre Sahiri n’a pas négligé l’échec de la communauté à gérer les diverses crises. Pour lui, cet échec se révèle là où la communauté a agi contre les populations au lieu de rechercher des solutions, aux différents problèmes : « Entre 2020 et 2024, le Mali, la Guinée, le Burkina Faso et le Niger ont connu des coups d’État militaires. Ces événements ont démontré la faillite totale de la CEDEAO à anticiper, prévenir ou gérer des crises internes à ses États membres. Les sanctions qu’elle a imposées ont été contre-productives, pénalisant les populations civiles tout en renforçant la popularité des régimes militaires, perçus comme plus souverains que les régimes pro-CEDEAO. »
‘La CEDEAO regarde ailleurs…’
En ce qui concerne les enjeux de sécurité au Sahel, l’enseignant-chercheur considère que la CEDEAO a été très faible et n’a pas réussi à apporter de changements pour la région : « Le Sahel brûle, et la CEDEAO regarde ailleurs. Aucun mécanisme de sécurité crédible n’a été mis en place pour contrer durablement les groupes djihadistes. Le G5 Sahel, structure parallèle, a presque été plus actif que la CEDEAO elle-même. » a-t-il-déclaré.
M. Sahiri n’a pas manqué d’évoquer l’un des thèmes les plus prisés en Afrique de l’Ouest : l’instauration d’une monnaie unique que tous les Africains revendiquent face au silence de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest : « Annoncé depuis plus de deux décennies, reporté sans cesse, l’ECO illustre l’incapacité de la CEDEAO à harmoniser ses politiques économiques. L’ingérence persistante de puissances étrangères, notamment la France via l’UEMOA et le franc CFA, empêche toute autonomie réelle. »
Au-delàs, l’expert a même reproché à la CEDEAO d’agir en tant qu’outil des forces occidentales, en particulier la France et les États-Unis, dans leurs manœuvres géopolitiques en Afrique de l’Ouest : « L’intervention au Mali en 2013 (via le soutien français), puis la réaction disproportionnée contre les régimes militaires, montrent que la CEDEAO agit souvent en concert avec des puissances étrangères, non pour les peuples africains. »
Dans ce contexte, la CEDEAO, en sa qualité d’organisation régionale, a démontré ses restrictions au fil des cinquante dernières années. Bien que les principes initiaux aient été admirables, l’organisation a connu des problèmes de faiblesse structurelle, d’incohérence dans ses initiatives et de déséquilibre dans ses priorités. La CEDEAO a été rendue vulnérable et difficilement légitime pour beaucoup de citoyens en Afrique de l’Ouest par les crises internes, les coups d’État successifs et les ingérences étrangères. L’organisation s’est éloignée de ses objectifs initiaux.
Ousmane Konaté
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