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Bénin : Un Fonds d’Investissement communal institué

Didier ASSOGBA
6 Min Read
Patrice Talon

Dans un nouveau coup de pouce à la décentralisation, le gouvernement béninois a franchi une étape décisive le 17 septembre 2025 en adoptant la création du Fonds d’Investissement communal (FIC) lors d’un Conseil des ministres présidé par le président Patrice Talon. Ce dispositif, dont les statuts ont été approuvés en même temps, remplace officiellement le Fonds d’Appui au Développement des Communes (FADeC), en place depuis plusieurs années, et s’inscrit dans une volonté affichée de moderniser la gestion des ressources locales.

Le FIC n’est pas qu’une simple réforme administrative : c’est une ambition stratégique pour renforcer l’autonomie financière des collectivités territoriales et accélérer le développement territorial équilibré. Alors que les communes peinent souvent à mobiliser des financements stables et prévisibles, ce nouveau fonds vise à doter les autorités locales d’un outil plus performant, transparent et aligné sur les standards internationaux de gestion publique.

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Un levier pour la décentralisation effective

« Le FIC marque une rupture avec les anciennes logiques de subvention ponctuelle. Il s’agit désormais d’accompagner les collectivités comme des acteurs économiques à part entière », a souligné un membre du gouvernement sous couvert d’anonymat. L’objectif est clair : permettre aux 77 communes du Bénin — ainsi qu’aux futurs établissements publics intercommunaux — de disposer de moyens durables pour investir dans les infrastructures, les services urbains, l’eau, l’énergie ou encore l’aménagement du territoire.

Contrairement au FADeC, qui fonctionnait principalement sur des transferts budgétaires contraints, le FIC se veut un instrument de financement innovant, capable non seulement de redistribuer les ressources publiques, mais aussi de capter de nouvelles sources de revenus. Cela inclut notamment les rétrocessions de fiscalité partagée (comme une partie de l’impôt sur les sociétés ou de la TVA), qui seront désormais canalisées de manière structurée vers les communes via le fonds.

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La transparence figure en tête des priorités du nouveau mécanisme. Le FIC sera chargé de veiller à une répartition équitable des fonds entre les communes, selon un système de péréquation qui prendra en compte des critères objectifs tels que la taille démographique, le niveau de développement, ou encore la capacité fiscale locale. Une avancée saluée par les experts en gestion publique, qui pointent régulièrement les disparités régionales dans l’accès aux ressources.

Autre innovation majeure : le FIC aura désormais la charge de suivre et d’évaluer rigoureusement les projets financés. Finis les « trous noirs » où disparaissent parfois des millions de francs CFA. Désormais, chaque projet devra faire l’objet d’un plan de suivi-évaluation précis, avec des indicateurs de performance mesurables. L’idée est de Garantir que chaque franc investi contribue réellement au développement durable des populations.

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Le fonds aura également pour mission de renforcer les capacités techniques des élus locaux et de leurs cadres administratifs, notamment en matière de montage de dossiers de financement, d’analyse économique ou de gestion comptable. Des formations spécifiques sont déjà envisagées en partenariat avec des institutions nationales et des bailleurs de fonds internationationaux.

Un fonds d’Investissement communal aux compétences élargies

Au-delà de la redistribution des subsides, le FIC disposera d’un pouvoir accru en matière de gestion active des ressources. Il pourra notamment réaliser, pour le compte des collectivités, des opérations de placement financier — obligations, titres sécurisés, fonds d’investissement — afin d’optimiser le rendement des liquidités communales. Une première au Bénin, qui pourrait servir de modèle à d’autres pays de la région.

Le fonds centralisera également l’ensemble des financements extérieurs destinés aux communes, y compris ceux provenant des partenaires techniques et financiers (PTF), évitant ainsi la dispersion des aides et garantissant une meilleure coordination. Toutefois, le gouvernement a précisé que les financements directs issus de conventions particulières, comme les jumelages entre une commune béninoise et une collectivité étrangère, resteront en dehors du giron du FIC, afin de préserver leur autonomie.

Pour beaucoup d’observateurs, le FIC arrive à point nommé. Alors que le Bénin ambitionne de devenir un pays émergent d’ici 2030, la décentralisation peine encore à produire ses effets escomptés. Les communes, souvent mal équipées et sous-financées, manquent de visibilité budgétaire à moyen terme.

Les prochains mois seront déterminants. Il faudra voir comment le FIC sera doté en personnel qualifié, comment il s’organisera territorialement, et surtout, comment il résistera aux pressions clientélistes. Mais une chose est sûre : avec cette réforme, le Bénin montre qu’il entend mettre les communes au cœur de sa stratégie de développement — pas seulement comme des rouages administratifs, mais comme des moteurs économiques à part entière.

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