Au Togo, les problèmes fonciers, artificiellement créés par de véreux acteurs de la justice, ont plusieurs conséquences. C’est le cas à Agoè-Telessou. Devant l’évidence des décisions judiciaires mal rendues et reconnues par la justice elle-même, la réparation de tort peine à être une réalité. A bout de souffle face aux démarches judiciaires et devant de nouvelles manœuvres des bourreaux de cette localité, les populations autochtones et les acquéreurs de « bonne foi » se tournent désormais vers le président togolais, Faure Gnassingbé afin que la situation se décante.
Une lettre a été adressée au chef de l’Etat togolais le 22 novembre dernier par le chef du village d’Agoè-Telessou, Togbui Dovi Koami Honkou au nom des populations autochtones et des acquéreurs de bonne foi de cette localité.
Et l’affaire n’est pas inconnue à Faure Gnassingbé, en janvier 2018, il a été invité à intervenir dans le dossier de ce village suite à une exacerbation du litige foncier que connait ce village. Selon le chef du village d’Agoè-Telessou, un groupe d’escrocs a par des moyens très peu orthodoxes, falsifié le plan global du village pour l’introduire frauduleusement dans le dossier d’un litige foncier portant au départ sur une parcelle devant servir à ériger une maison d’habitation.
Se basant sur le faux document, le juge en charge de l’affaire a attribué tout le village d’une superficie de 14ha 10a 90ca au plaignant qui réclamait sa parcelle devant servir à construire une maison d’habitation.
« Suite à cette attribution erronée de tout notre village à un individu qui de surcroît n’est pas du milieu, moi et ma population ainsi que tous ceux qui ont acquis de bonne foi des terrains dans notre village, n’avons plus la paix. Nous sommes permanemment menacés d’expulsion et nous subissons des exactions des gros bras qui viennent démolir nos maisons et clôtures, nous déloger et nous déposséder de nos terrains », renseigne Togbui Dovi Koami Honkou.
Il faut dire que depuis 2018, les autorités togolaises ont été saisies du dossier. Et suite aux instructions du chef de l’Etat, le ministre de la justice, Pius Agbetomey, le Procureur Général de la Cour d’appel et le procureur de la République, ont introduit auprès du Président du Tribunal une procédure de régulation de la situation liée à la falsification du plan du village.
Ainsi, une requête civile a été initiée depuis mai 2018. Ce dossier suit son cours normal et est actuellement dans sa phase de délibéré au cabinet du vice-président du Tribunal de première instance.
Pendant qu’on y est, les autochtones et les acquéreurs de terrains de ce village, sur la base des informations qui circulent, interpellent Faure Gnassingbé à veiller de près pour que le faux et usage de faux soit condamné et que la justice soit dite dans le dossier.
« Nous craignons que ce groupe complexe de truands aux ramifications insoupçonnables ne dorment pas sur ses lauriers à cause de leur soif de s’emparer de tout le village », écrit le chef d’Agoè-Telessou.
A la genèse de l’affaire d’Agoè-Telessou
A la suite d’un lotissement de leur domaine sis à Agoè Télessou, les membres de la collectivité HELOU-NOUWATSI (VIZA, HONKOU, DOVI et APEDO), ont annexé le terrain rural du sieur ATALI Mississo. Ce dernier exploite les lieux pour les avoir acquis par voie de donation de son père adoptif DJEHON, véritable propriétaire du terrain. Les membres de la collectivité HELOU-NOUWATSI ont attribué 14 lots au sieur ATALI et à LABA (un autre donataire de DJEHON), et se sont partagé le reste des lots, soit environ 92 lots.
Le litige a été porté devant le chef canton d’Agoè-Nyivé. Après transport sur les lieux, ce dernier a décidé d’un partage équitable entre les parties. Ce que refusa la collectivité HELOU-NOUWATSI, obligeant ATALI Mississo à saisir la Justice.
Par requête en date du 04 février 1997, ATALI Mississo a saisi le Tribunal de Première Instance de Première Classe de Lomé, pour s’entendre confirmer son droit de propriété sur la parcelle de terrain qui avait été donnée à son père par le sieur DJEHON. A l’issue de cette assignation, la Chambre civile et commerciale du Tribunal de céans a rendu le jugement n°652/2002 en date du 03 mai 2002 confirmant le droit de propriété du sieur ATALI Mississo sur le terrain litigieux à Agoè-Télessou ;
Mais une faille a été détectée dans le jugement rendu. En effet, ni la contenance, ni les limites du terrain revendiqué ne sont mentionnées. Ainsi dans un jugement rectificatif nº3426/2010 du 29 octobre 2010, le Tribunal a attribué tout le village au sieur ATALI Mississo. Ce que ce dernier n’a jamais revendiqué.
Faisant suite au tollé général et à l’indignation que cette affaire a provoqué, le ministère public a initié une procédure civile pour corriger le tir. Sur instructions du chef de l’Etat et du ministère de la justice, le procureur de la République d’alors, Essolissam Poyodi a saisi le président du Tribunal de première instance pour que le jugement n°3426/2010 du 29 octobre 2010 soit retracté. Il l’avait invité à statuer à nouveau pour confirmer le droit de propriété du sieur ATALI Mississo sur la parcelle revendiquée, d’une contenance de 23 lots ainsi qu’il résulte de ses prétentions. Plutôt que lui attribuer tout le village.
Et au procureur de la République d’alors d’expliquer que l’exécution dans ces conditions d’un tel jugement « pourrait être facteur d’une injustice flagrante et de remise en cause de la paix sociale ».
Le chef de l’Etat togolais, Faure Gnassingbé et le ministre de la justice, Pius Agbetomey sont appelés à suivre de près ce dossier pour que les auteurs du faux et usage de faux soient identifiés et que les victimes de cette entreprise soient rétablies dans leurs droits.