Me Zeus Ajavon et 5 autres avocats avaient défendu entre 2011 et 2013, 33 des personnes impliquées dans le dossier d’atteinte à la sûreté de l’Etat. La plupart des prévenus avait été condamnée par la Cour suprême du Togo à l’issue du procès. Mais grâce à Me Ajavon et ses collègues, les mis en cause ont réussi à faire condamner l’Etat togolais par la Cour de justice de la CEDEAO pour cause de torture. Alors que les dommages et intérêts avaient été versés aux victimes, une somme de 258 millions divise désormais le principal avocat et ses anciens clients.
Me Zeus Ajavon, Me Darius Atsoo, Me Djovi Gally, Me Jil-Bénoît Afangbedji, Me Raphaël Kpande-Adzare et Me Jonas Sokpoh avaient défendu les militaires togolais accusés d’avoir fomenté un coup d’Etat contre Faure Gnassingbé. Ces agents avaient été condamnés à des peines d’emprisonnement à Lomé. Leurs avocats avaient dénoncé des vices de procédures pour le fait qu’ils avaient été torturés en vue de leur extorquer des aveux.
Devant la Cour de justice de la CEDEAO, le fait de torture a été établi et l’Etat togolais avait été condamné à rétablir les mis en cause dans leurs droits et à leur payer des dommages et intérêts. Pour les 33 personnes concernées, la somme à leur verser a été évaluée à 532 millions Fcfa. Dans cette somme, 3 personnes dont Kpatcha Gnassingbé, Oliver Amah-Poko et le commandat Atchi, devraient percevoir 3 millions pour n’avoir pas été torturés. Les 30 autres personnes devraient percevoir chacun 20 millions.
« Lorsque les victimes ont touché le 532 millions, nous avons eu à défalquer 5 millions dans les 20 millions de chacun et 20 % pour ceux qui ont touché 3 millions. Nous avons remis à Kpatcha Gnassingbé ses 44 millions et le reste les avocats se sont partagé ça. Je n’ai rien bloqué. J’ai distribué l’argent équitablement. Au lieu d’une cinquantaine de millions, les avocats ont reçu 17 millions chacun. Moi je n’ai même pas eu les 17 millions. », précise Me Zeus Ajavon à Togoinfos.
Mais depuis quelques mois, l’Association des victimes de la torture au Togo (ASVITTO) dirigée par l’ancien gendarme Kao Atcholi accuse Me Zeus Ajavon d’avoir gardé par devers lui une somme de 258 millions versée en mars 2020 par l’Etat togolais.
‘les honoraires d’un avocat’, Zeus Ajavon
L’avocat rompt le silence et explique que cette somme n’est rien d’autre que les honoraires d’un avocat que l’Etat togolais était obligé de payer pour avoir perdu le procès.
« L’article 69 du règlement de la cour de l’UEMOA stipule que la partie qui succombent doit payer les frais d’un avocat et les frais de transports… Nous étions six avocats alors que l’Etat a payé les honoraires d’un avocat », explique celui qui a enseigné le droit public dans les Universités du Togo.
Me Zeus Ajavon ajoute que pour être cohérent dans sa démarche, il a dû partager les 258 millions avec les 5 avocats qui ont défendu le dossier avec lui. Bien qu’il ait été le seul à faire les démarches sur Abuja notamment. Il appuie par ailleurs que les décharges des autres avocats sont là pour preuve.
Une plainte a été déposée par Kao Atcholi, le président de l’ASVITTO devant le bâtonnier de l’ordre des avocats sur le sujet. Mais après la réponse donnée par Me Ajavon, l’ex-gendarme n’a pas eu gain de cause.
« Ce qu’il réclame, ce sont les honoraires d’un avocat… Et malgré toutes les explications qui leur ont été données, ils décident de se répandre sur les réseaux sociaux », a regretté Me Zeus Ajavon qui n’en revient pas.
L’ex-Coordonnateur du Collectif Sauvons le Togo (CST) a précisé qu’il a commencé à défendre Kao Atcholi et tous les autres impliqués dans le dossier d’atteinte à la sûreté de l’Etat sans avoir reçu un seul franc de leur part. Seul Kpatcha Gnassingbé, a-t-il nuancé, a avancé de l’argent au milieu de la procédure, précisant que la somme lui a été retournée lorsque l’Etat a payé les dommages et intérêts.
Un bienfait mal récompensé ou de l’ingratitude ? L’avocat se garde de faire des appréciations sur le comportement de ses anciens « clients ».