Le Pacte socialiste pour le renouveau (PSR) condamne fermement la démarche en cours actuellement à l’Assemblée nationale tendant à changer la constitution togolaise. Professeur Komi Wolou évoque des raisons de constitutionnalité, de légitimité et d’éthique qui ne permettent pas aux ‘députés en fin de mandat’ de poser un tel acte. Il invite le chef de l’Etat à éviter au Togo un chaos social.
La constitutionnalité de la révision
Evoquant d’abord la constitutionnalité de la démarche en cours au Parlement, le président du PSR indique que l’Assemblée nationale actuelle n’a plus le pouvoir de modifier la constitution. Au sujet de l’article 52 dernier alinéas de la Constitution, Prof Komi Wolou estime que cette disposition vise à permettre, alors que le mandat des députés a pris fin, de répondre aux situations d’urgence ou encore, lorsque l’État est dans l’impossibilité d’organiser les élections alors que le mandat a pris fin.
« La situation actuelle dans laquelle la Constitution togolaise est en train d’être modifiée ne correspond ni à une situation d’impossibilité ni à une situation d’urgence. L’article 52 n’a pas pour finalité d’autoriser une prorogation artificielle du mandat des députés. Il existe une différence entre l’exercice d’un mandat et rester en fonction alors que le mandat a pris fin », a martelé l’ancien candidat à l’élection présidentielle de 2020.
Pour Prof Wolou, cette assemblée dont le mandat a pris fin ne devrait même pas être convoquée pour une session ordinaire. « A plus forte raison pour la modification de la Constitution qui est le texte fondamental » du pays.
« Peut-on imaginer un instant que l’Assemblée nationale est dissoute par exemple par le président de la République et que les députés, après la dissolution donc du Parlement, se mettent à modifier la Constitution alors que nous sommes dans l’attente des élections ? Cela pourrait constituer un scandale et nous sommes persuadés que le président de la République aussi ne pourrait admettre une telle situation. Nous sommes dans un cas similaire », relève-t-il.
Eviter un chaos social
Le président du PSR affirme que le mandat des députés selon l’article 52 a pris fin et qu’ils sont simplement en fonction pour répondre aux situations d’urgence.
« La loi cesse d’être lorsque cesse sa raison d’être. Nous ne sommes pas dans cette situation alors le Parlement n’a plus l’entièreté de ses compétences », avance le professeur de droit des Universités du Togo.
Se prononçant sur la légitimité de la démarche, il convoque l’article 146 de la Constitution togolaise qui dispose que « la source de toutes les légitimités découle de la présente Constitution ». Ainsi, Prof Komi Wolou affirme que les initiatives de l’Assemblée nationale ne seront légitimes que lorsqu’elles restent dans le cadre des attributions qui lui sont reconnues par ladite Constitution.
« La Constitution ne reconnaît pas au Parlement le pouvoir de modifier la Constitution alors que nous sommes dans une situation de fin mandat. Et il n’y a ni urgence ni impossibilité d’organiser de nouvelles élections », soutient-il.
Pour l’opposant au pouvoir de Faure Gnassingbé, la précipitation dans laquelle se fait cette modification de dernière minute est la preuve que le régime en place est conscient qu’après les élections qui s’annoncent il n’y ait plus de possibilité de procéder à une telle entreprise.
L’éthique selon Prof Wolou
Enfin, sur le plan éthique, le professeur de droit se demande s’il est normal qu’une assemblée dont le mandat a pris fin se mette à modifier la Constitution sans enfreindre les règles morales.
« Pour les principes moraux qui doivent sous-tendre l’action publique, la politique synthétique n’est qu’une aventure de destruction de la cité. Un auteur le disait clairement. De l’absence de l’éthique naît le chaos social. Nous invitons le président de la République à épargner le Togo d’un chaos social. Il est encore temps de faire marche arrière », exhorte-t-il.
Pour Prof Wolou, s’il est nécessaire de modifier la Constitution togolaise, il importe de le faire dans un esprit de consensus après de réels débats par une assemblée nationale qui suivra les règles conforme à la Constitution.
« Modifier la Constitution dans une situation d’illégalité sera source d’un chaos social. Il y a encore beaucoup de choses à dire sur le contenu des modifications envisagées sur le plan même de leur constitutionnalité. Mais nous aurons l’occasion d’en parler. Pour l’instant, sur le principe même de la modification, la démarche est de toute évidence contraire à l’esprit de la Constitution », a soutenu le professeur de droit.