Les Nations Unies font le redresseur de torts des journaux suspendus récemment au Togo. Pour la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, la suspension des journaux L’Alternative, Liberté et Fraternité et le retrait du récépissé au journal L’Indépendant Express suite à des articles de presse critique, ne répondent pas aux exigences de légalité, nécessité et proportionnalité, prévues à l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel le Togo a accédé le 30 mars 1988. Irene Khan interpelle à cet effet le gouvernement togolais et lui exige des explications.
Dans une correspondance en date du 19 mars dernier, la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, a notifié au gouvernement que les récentes sanctions infligées à l’Alternative, Liberté et Fraternité ne sont pas justifiées.
« Je suis particulièrement préoccupé par le manque de clarté des décisions de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication quant aux dispositions légales que ces journaux auraient violées. Plus précisément, je suis préoccupé par l’utilisation de la réglementation en vigueur sur la diffamation, qui lorsque celles-ci n’est pas rigoureusement définie, peut être utilisée de manière abusive afin de sanctionner illégitimement ou arbitrairement des journalistes et les entraver dans leur mission d’information du public » a déploré le rapport.
A cet effet, l’organisation demande au gouvernement togolais de lui transmettre toute information ou tout commentaire complémentaire en relation avec les allégations susmentionnées.
De fournir des informations sur les motifs juridiques justifiant la suspension des trois journaux et le retrait de récépissé d’un quatrième, y compris les dispositions de la loi qui auraient et violées, et la conformité de ces décisions avec l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
D’indiquer les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations du Comité des droits de l’homme et de la précédente Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l’homme, suite à sa visite au Togo en février 2014, dans le domaine de la liberté d’opinion et d’expression, y compris s’agissant des recommandations se rapportant à la HAAC.
Les Nations exigent aussi des autorités togolaises de montrer les mesures prises pour protéger les journalistes contre les actes d’intimidation. Dans le contraire, elles recommandent l’annulation des sanctions.
« A défaut de décisions qui respectent les exigences de légalité, nécessité et proportionnalité, je demande au Gouvernement d’annuler les décisions de suspension et de retrait de récépissé des journaux susmentionnés, de procéder le cas échéant à ce qu’ils obtiennent compensation pour toute violation indue à leurs droits, et de leur permettre d’exercer leur liberté d’expression dans le cadre défini par le droit international des droits de l ’homme », a écrit Irene Khan.
Suspension et retrait de récépissé
Le 5 février dernier la HAAC a suspendu le journal Alternative de 4 mois pour avoir manquements graves. Liberté a écopé de 15 jours de suspension pour avoir publié un article intitulé « Marc Vizy, l’autre ennemi de la démocratie au Togo ».
Le journal Fraternité quant à lui a été suspendu de 2 mois le 30 mars 2020 pour avoir dénoncé les sanctions de la HAAC. Le 15 janvier 2021, L’Indépendant Express a vu son récépissé retirer par la justice à cause de l’article « Scoop de fin d’année : Femmes ministres interpellées pour vol de cuillères dorées ».